A la une

Elle plaisante sur Morano et est licenciée pour faute grave

Par Anthony Cerveaux | Journaliste | 30/05/2011 | 19H02
Partager:
Changer mon statut sur 'Twitter'
Partager sur 'Facebook'
Partager sur 'del.icio.us'
  • spacer
  • spacer
  • spacer
  • spacer
  • spacer
  • spacer
  • spacer
  • spacer

« Je veux des suites à ce dossier », avait prévenu la ministre, qui a surpris, début avril, Albane, vendeuse au Printemps de Nancy.

spacer

spacer Le 9 avril, Nadine Morano, ministre de l'Apprentissage et de la Formation professionnelle, fait des emplettes au Printemps de Nancy (Meurthe-et-Moselle), en compagnie de sa fille et… d'un garde du corps. La présence du cerbère suscite quelques plaisanteries des employées. Plaisanteries qui se soldent par un licenciement pour faute grave, pour l'une d'entre elles.

Albane, 36 ans, responsable du stand Kookaï, raconte :

« En plaisantant, un de mes collègues a affirmé qu'il pourrait le mettre en deux temps, trois mouvements par terre.

On arrivait alors devant la porte de service qui mène aux coursives du Printemps. J'ai répondu que pour se mesurer à lui, il fallait d'abord casser la gueule à Mme Morano. »

La ministre se trouvait juste derrière à ce moment-là. Albane et ses collègues restent interdits :

« On ne l'avait pas vue, elle n'a entendu que la fin de la discussion. Elle s'est énervée et a rétorqué : “Allez-y si vous voulez me casser la gueule, je vous en prie, je suis là.” »

Nadine Morano : « Je n'en ai rien à foutre mademoiselle ! »

Albane s'est alors vivement excusée. Une version que confirment deux témoins :

« Elle s'est très largement confondue en excuses. Elle a reconnu que, même en plaisantant, c'était une bêtise. Elle n'a pas du tout fait exprès pour entrer en conflit avec elle. »

Albane, déconcertée :

« Je m'attendais à ce que Mme Morano prenne un peu de hauteur et me dise : “Faites attention à votre langage.” C'est pourquoi j'ai réitéré mes excuses en disant que je ne voudrais vraiment pas perdre mon travail. »

Selon Albane, la ministre lui a alors répondu, hautaine et avec dédain :

« Je n'en ai rien à foutre mademoiselle ! Vous n'aviez qu'à mesurer vos propos. Si j'avais été votre employeur vous auriez été licenciée sur-le-champ ! »

« Elle a donné sa carte du ministère »

Nadine Morano a alors demandé un responsable, puis les coordonnées du directeur du Printemps, absent ce jour-là. « Elle a également donné sa carte du ministère en disant : “Je vous préviens, je veux des suites à ce dossier” », indique Albane.

Cette dernière a été priée de quitter le magasin afin que la ministre et sa fille terminent leurs achats sans être en contact avec l'employée.

Jointe par Rue89, la direction du Printemps de Nancy refuse de commenter.

Albane : « Ils n'ont tenu compte que de la version de la ministre »

Inquiète pour son travail, Albane a immédiatement contacté la responsable régionale de Kookaï pour lui faire part de sa version des faits.

« Le lundi [11 avril, ndlr], ils me contactent pour me dire qu'ils vont essayer de me recaser dans un magasin Kookaï.

Et puis dans la foulée, ils me rappellent pour me dire que je suis mise à pied à titre conservatoire. »

Trois jours après, la jeune femme reçoit un courrier. Elle est convoquée au siège de Kookaï à Paris le 21 avril. Arrivée à l'entretien :

« Je n'ai même pas pu m'expliquer. D'emblée, la direction m'a dit que mon comportement avait été inadmissible et que j'avais jeté l'opprobre sur le Printemps et la société Kookaï.

Ils ont seulement tenu compte de la version de Mme Morano et ont précisé que ça n'avait rien à voir avec l'importance de la cliente, ce dont je doute fortement. »

Joint par Rue89, Kookaï aussi refuse de commenter.

Un témoin : « Il n'y a eu aucune attaque personnelle »

Le 27 avril, Albane est licenciée pour faute grave. Le courrier mentionne des « insultes et des injures » envers la ministre et stipule que l'employée a invectivé personnellement Nadine Morano depuis son stand Kookaï.

spacer Faux, selon un des témoin :

« La version rapportée dans la lettre de licenciement est complétement erronée. En aucun cas, il n'y a eu aucune attaque personnelle d'Albane envers Mme Morano. » (Télécharger la lettre)

Par ailleurs, Albane constate qu'aucun des faits rapportés par sa version n'est présent dans le courrier. « Ils ont seulement repris la version de Mme Morano », regrette t-elle.

« Je ne pensais vraiment pas que ça en arriverait là. Lorsque je suis allé à l'entretien, la déléguée syndicale m'a dit qu'il y avait déjà eu des cas comme ça avec des blâmes ou des avertissements, mais jamais de licenciement. Pour elle, c'était une décision démesurée. »

« Avec ce dossier, comment je vais retrouver du travail ? »

Albane a un enfant, et des traites à payer. Elle est aujourd'hui au chômage et craint de ne pas pouvoir retrouver un emploi :

« Quand on est responsable de boutique, le nouvel employeur appelle toujours l'ancien pour une recommandation. Imaginez avec ce dossier, comment je vais retrouver du travail ? »

Un sentiment que doit comprendre Nadine Morano qui déclarait encore, le 5 mai, sur BFM-TV, en apostrophant Jean-Jacques Bourdin :

« Quand vous êtes victime du chômage, M. Bourdin, vous croyez que c'est pas une source d'angoisse.. » (Voir la vidéo, à la sixième minute)

Avec une lettre d'attestation des deux témoins, Albane a décidé d'attaquer la société Kookaï devant les prudhommes pour licenciement abusif.

« Profondément choquée par cette interpellation menaçante »

Le cabinet de Nadine Morano a d'abord indiqué qu'elle ne souhaitait faire « aucun commentaire sur cet événement ».

Puis dans la soirée la ministre a publié un communiqué où elle raconte qu'au moment de prendre sa pause, la vendeuse aurait crié :

« Il y a Nadine Morano dans le magasin, si quelqu'un veut aller lui casser la gueule. »

« Profondément choquée par cette interpellation menaçante, insultante et blessante“la ministre précise avoir ‘demandé des excuses à cette vendeuse en rappelant le droit au respect pour tout client, quel que soit son statut’.

Selon elle, l'employée a ‘reconnu la gravité de ses propos déplacés en présence de la directrice adjointe du Printemps et a fait part de ses excuses’.

‘Les faits en sont restés là’,insiste Nadine Morano, en précisant que le licenciement de la vendeuse ‘relève de la seule appréciation et de la seule responsabilité de son employeur’, avec lequel elle n'a eu ‘aucun contact’.

Une visite privée au Louvre, pour sa fille

La ministre s'était illustrée au début du mois de mai en exigeant, dans l'heure, une visite privée et accompagnée du Louvre pour sa fille et une amie.

Une demande pour une visite VIP à 500 euros qui s'était retrouvée dans Le Canard enchaîné (édition du 18 mai), conformément à la prédiction de l'administrateur général du Musée.

►Mis à jour le 30 mai à 22h30. Ajout du communiqué de Nadine Morano

spacer

Photo : Nadine Morano au campus UMP d'été à Seignosse (Landes), le 6 septembre 2009 (Audrey Cerdan/Rue89). Dessin : Baudry.

A lire aussi sur Rue89 et sur Eco89
  • ► La photo qui a mis en rogne Morano la coquette
  • ► Morano dérape ? La faute au « contexte », bien sûr
  • ► Face aux caméras, Morano interroge un quidam… élu UMP
  • ► Tous nos articles sur Nadine Morano
Partager:
Changer mon statut sur 'Twitter'
Partager sur 'Facebook'
Partager sur 'del.icio.us'
  • commerce
  • gouvernement
  • morano
  • 496272 visites
  • Version imprimable
  • 277 votes

7 spacer

spacer

De Kokkino

.. | 20H01 | 30/05/2011 | spacer

Question naïve : lorsque Madame M. s'adonne au shopping en famille, ne redevient-elle pas une personne privée ? Il semble que non, vu sa réaction...

Je crois me souvenir qu'elle avait déjà, voici un an ou deux, cherché des poux dans la tête d'une internaute qui avait eu l'outrecuidance d'émettre un jugement négatif à son encontre.

Ce serait bien de nous tenir informés de ce qui arrive à Albane. Courage à elle !

140 votes
  • voir le commentaire dans son contexte
spacer

De Natalye

Employée | 20H50 | 30/05/2011 | spacer

Comportement misérable, honteux, indigne.

Il fut un temps ou nos responsables politiques avaient un peu de classe.....un peu d'intelligence aussi.
Il fut un temps....

136 votes
  • voir le commentaire dans son contexte
spacer

De Xavier Denamur

Restaurateur | 21H06 | 30/05/2011 | spacer

Cette triste histoire comme l'ont bien résumée certains riverains est encore une illustration de la connerie immuable de ces puissants dont on devrait définitivement se débarrasser.
En ce qui concerne le licenciement d'Albane pour faute grave avec mise à pied, il est plus que léger. S'il n'y avait pas de faits similaires antérieurs à lui reprocher ( rien n'est mentionné sur ce sujet dans la lettre de licenciement), son employeur devrait sans l'ombre d'un doute perde aux prud'hommes. Ne pouvant pas ignorer la jurisprudence en la matière, la société KOOKAI a décidé de faire du zèle pour faire plaisir à la ministre. Un boycotte total de cette marque me semble la seule sanction citoyenne juste.
Pour soutenir Albanne, faites marcher vos contacts pour lui retrouver rapidement un travail sur Nancy.

160 votes
  • voir le commentaire dans son contexte
spacer

De Ishtar

?? | 21H19 | 30/05/2011 | spacer

""« Je n'en ai rien à foutre mademoiselle ! ""

à la suite de cela,elle ajoute sans aucun complexe:

""Vous n'aviez qu'à mesurer vos propos.""

C'est cocasse comme ces élus intransigeants avec leurs électeurs ( qui sont tout de même leur employeur!!!) deviennent laxistes quand un des leurs est visé.Combien de fois a t-on entendu de leur part qu'il ne fallait pas s'arrêter à une petite phrase,comme par exemple pour Sarkozy himself quand il a sorti son "casse toi pov' con" ou quand Hortefeux s'est illustré avec son " c'est quand il y en a plusieurs bla bla...etc.L'indulgence est de mise pour tous ces dérapages de membres du gouvernement.Mais carefull Miss Morano car votre employeur à savoir les Français peuvent vous virer sur le champ!!! Pour peu qu'ils se rendent effectivement compte que ces employés de l'état que sont les ministres font leur boulot de manière pitoyable.

158 votes
  • voir le commentaire dans son contexte
spacer

De la champenoise

22H11 | 30/05/2011 | spacer

"salariée, qui au passage n'a pas été très inspirée de parler comme ça..."
Peut-être, mais il parait que nous sommes en démocratie. Je ne savais pas qu'au pays de la liberté et des droits de l'homme on devait courber l'échine devant Madame la Ministre (je me méfie, elle serait capable de me traduire en justice si j'écrivais comment j'aimerai l'appeler...) qui craint si fort le peuple qu'elle ne peut faire ses courses qu'accompagné d'au moins un garde du corps. Vanité, quand tu nous tiens .....

107 votes
  • voir le commentaire dans son contexte
spacer

De Briereherbi

Prof | 10H13 | 31/05/2011 | spacer

Actuellement je vis en Chine et je suis originaire de la France. En lisant cela et en supposant que c'est vrai, j'ai un seul mot en tête : communisme. Le problème n'est pas l'entreprise qui vire la personne mais cette personne du gouvernement qui use de son pouvoir tout simplement car elle est trop sensible.
Une honte a un pays qui ose dire « Fraternité, Égalité, Liberté. » sans même en connaître la définition exacte. Pire, si les membres du gouvernement n'agissent pas. En Chine ce genre d'histoire est tout naturel. Les occidentaux critiquent bien souvent l'aspect communiste de la Chine... Ils feraient mieux de « fermer leurs gueules » (Désolé, pour la vulgarité)
Bravo ! En tout cas, je vais me faire un plaisir d'expliquer à mes étudiants chinois la vraie France d'aujourd'hui qui va finir par tomber plus bas que la Chine qui en voit des vertes et des pas mûres.

73 votes
  • voir le commentaire dans son contexte
spacer

De Jambalaya

Le contenu de ce champ apparaît ent... | 21H42 | 31/05/2011 | spacer

Morano n'est pas ma tasse de thé, mais insulter une cliente, ça s'appelle une faute professionnelle, tout simplement. Et quand on commet une faute professionnelle de ce genre, on risque le licenciement. Où est le scandale ?

43 votes
  • voir le commentaire dans son contexte

spacer

Vous avez aimé cet article ? Achetez votre plaque et soutenez l'indépendance de Rue89

Appelez le 08 99 19 40 70 (1,68 € / appel)

Envoyez « RUE » par SMS au 81027 (1,5 € / SMS)

En savoir plus

Accrochez une plaque Rue89 sur votre page de membre et dans vos commentaires. Votre plaque, qui comportera votre numéro de riverain, apparaîtra pendant un mois.

123456
Rentrez le code que vous recevrez dans le cadre ci-dessous pour activer votre plaque

spacer
Connectez-vous pour entrer votre code
gipoco.com is neither affiliated with the authors of this page nor responsible for its contents. This is a safe-cache copy of the original web site.